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Christian Wulff (© Boris Buchholz)
Christian Wulff (© Boris Buchholz) 

6.9.2011: Cérémonie à la mémoire de Noach Flug

Discours du président de la République fédérale d'Allemagne Christian Wulff

Nous sommes réunis ici, aujourd'hui, pour honorer la mémoire d'un grand homme, Noach Flug. Noach Flug a subi l'indicible et a accompli quelque chose de magnifique. Ce que des mains allemandes lui ont infligé a été terrible et pourtant il a été l'un des premiers à tendre la main de la réconciliation aux Allemands. Il avait des raisons impérieuses d'être amer et, cependant, il nous a fait don de sa cordialité, son humour et sa joie de vivre.

Je l'ai rencontré la dernière fois lors de ma visite à Jérusalem. Sa personnalité aimable, généreuse m'a profondément impressionné. Son épouse, Dorota Flug, qui malheureusement ne peut être parmi nous aujourd'hui, l'a accompagné et soutenu depuis la période commune au ghetto de Lodz. Je sais qu'un lien étroit a uni ces deux êtres. C'est pourquoi, je présente à Madame Flug mes condoléances les plus sincères. Mais, ma pensée va également à sa famille, représentée par son petit-fils, Monsieur Boaz Levin, et à tous ses compagnons de route.
Il y a un an, en ce lieu, à l'occasion de la cérémonie du dixième anniversaire de la création de la fondation « Mémoire, responsabilité et avenir », Noach Flug a donné un aperçu de sa bouleversante biographie. Il a ainsi raconté qu'il avait été déplacé de force, à l'âge de 14 ans, de sa ville natale Lodz au ghetto. Il s'est alors engagé dans la résistance contre la terreur nazie, puis a été déporté en 1944 au camp de concentration d'Auschwitz et a été astreint, lors de l'évacuation du camp, à la marche de la mort. Finalement, il a été libéré du camp de concentration de Mauthausen-Ebensee et ainsi de son martyr inimaginable de plus de cinq années. En jetant un regard rétrospectif sur lui-même, Noach Flug a dit lors de la cérémonie, « J'avais 20 ans et je pesais 32 kilos. Lorsque je suis rentré à Lodz, plus aucune des quelque 100 personnes de ma famille ne vivait ».

Continuer à commémorer le souvenir des victimes de la Shoah, élever la voix en faveur des survivants et œuvrer pour le rapprochement entre Juifs et non-Juifs, entre Israël et l'Allemagne. Telle a été l'œuvre de toute la vie de Noach Flug. Nous nous inclinons avec le plus grand respect devant lui et son œuvre si exceptionnelle.
« La mémoire » – disait-il, ici, à la représentation du Land de Basse-Saxe, dans son discours mémorable, souvent cité – « est comme l'eau. Elle est vitale et cherche ses propres voies dans de nouveaux espaces et vers d'autres hommes. Elle est toujours concrète. Elle revoit des visages et des lieux, se souvient d'odeurs et de bruits. Elle n'a pas de date de péremption… ».
Transmettre la mémoire signifiait pour lui, faire aux jeunes le récit des horreurs indescriptibles de la Shoah et contribuer ainsi à ce que cette « rupture de civilisation » ne puisse pas se répéter. Lors de ses récits, il a profondément impressionné ses auditeurs – par ses descriptions exemptes de toute amertume. Sa mémoire est devenue notre mémoire. En tant que président du Comité international d'Auschwitz, fonction pour laquelle il a été élu en 2002 par les survivants du camp d'Auschwitz-Birkenau, la préservation du Mémorial et le travail pédagogique des centres internationaux de rencontre pour la jeunesse lui tenaient particulièrement à cœur.

Noach Flug est intervenu, avec un sens aigu de la justice, en faveur des survivants. Avec fermeté, il a rappelé à la Jewish Claims Conference nos obligations envers les victimes survivantes de la Shoah. Leur permettre une vie dans la dignité, c'était le souhait le plus cher de Noach Flug. Il a grandement contribué à la création de la fondation « Mémoire, responsabilité et avenir » pour le dédommagement des anciens travailleurs forcés.

Noach Flug fait partie des pères de l'amitié germano-israélienne. Ce n'était pas du tout évident, et c'était un signe très personnel, de se faire muter à Bonn, dans les années 80, en tant que diplomate israélien. Pendant l'exercice de cette fonction, il a toujours mis l'accent sur l'avenir commun de nos deux pays.

Pour ses multiples engagements concernant les relations entre Israéliens et Allemands, entre Juifs et non-Juifs, Noach Flug a été décoré, par mon prédécesseur, de la Grand-Croix de l'Ordre du Mérite de la République fédérale d'Allemagne.

Je me réjouis que la graine de l'amitié germano-israélienne semée par Noach Flug ait germé. Monsieur Levin, le fait qu'aujourd'hui, en tant que son petit-fils, vous fassiez des études à Berlin, en est la plus belle preuve. Noach Flug a fait un don à notre pays. Quel don et quelle humanité !

À nous Allemands, Noach Flug a fait don de sa confiance. Il était convaincu que nous menons une réflexion approfondie sur notre passé et que nous combattons l'anti-sémitisme et l'extrémisme de droite, aujourd'hui comme demain.

Avec la disparition de Noach Flug, l'Allemagne perd un magnifique ami et un véritable exemple d'humanité. Ses messages étaient la sincérité, la compréhension et la réconciliation. Noach Flug demeure la preuve que la mémoire de la Shoah constitue la base de notre futur commun et en est partie intégrante. Son œuvre et sa grandeur humaine signifient pour nous mission et obligation. Nous continuerons sur sa voie. Merci Noach Flug.